Origine du mot résilience (spécial Octobre rose)

Isandre, du blog de la Plume d’Isandre, m’a invitée à participer à Octobre rose pour la lutte contre le cancer du sein, avec pour thème la créativité. La résilience est d’une grande aide pour les malades, et est le fondement de toute créativité lorsque l’on est confronté à la maladie. Et coup de chance étymologique, l’origine de ce mot est passionnante.

Origine de « résilience »

Le mot « résilience » a été emprunté à l’anglais. Deux fois. Resilient est apparu aux alentours de 1620 dans la langue anglaise, et désignait « l’acte de rebondir ». Il vient du latin resilire qui veut littéralement dire « rebondir », et est composé — histoire que, si on n’avait pas compris, on soit sûr de sûr que ça veut dire « rebondir » — de -re dans son sens de « revenir à sa place d’origine » et de salire « sauter ». Sauter vers sa place d’origine, c’est clairement « rebondir ». Merci le latin, merci l’anglais. Attendez, on a dit que le mot avait été emprunté deux fois à l’anglais ? On peut savoir pourquoi ?

Premier emprunt (1857)

« 1857, l’acier rebondissant arrive sur le marché. Sortez les casques de chantier, plus personne n’est en sécurité nulle part ! » — Citation apocryphe et anonyme

Les Français du 19e s. voient passer un nouveau mot anglais de physique qui signifie alors « résistant aux chocs » : resilient.
« Trop cool ! », se disent-ils en français de 1857, « comme on n’a pas de mot pour parler de ce super acier tout nouveau qui résiste aux chocs, on n’a qu’à leur piquer ça, rajouter un accent aigu, et voilà ! ».


Merci de lire Le Détective des Mots

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Deuxième emprunt (vers 1970)

Cent ans plus tard, les Français du XXe s. voient passer un mot anglais qui leur dit vaguement quelque chose : resilient. Mais cette fois-ci, il est allé voir en psychologie et en politique et a gagné un sens figuratif, notamment pour parler de la solidité des institutions britanniques.
En réalité, c’est surtout un Français qui s’est dit que ces nouvelles connotations psychologiques et politiques du mot resilient en faisait le candidat idéal pour parler du concept de « ressort intime face aux coups de l’existence » (B. Cyrulnik, 1990). Ainsi, c’est à Boris Cyrulnik que l’on doit l’application du concept de résilience aux situations où l’on doit surmonter les chocs traumatiques et faire face à l’adversité. C’est ce deuxième sens que nous connaissons le mieux aujourd’hui, et qui nous intéresse durant cette Octobre rose.

Bonus

Comme l’écrit Isandre dans son article introductif sur Octobre rose sur son blog :

« Mais on le sait, les épreuves ont nourri l’art et la création de tous temps, aussi j’ai souhaité aborder ce projet en me penchant plus sur la créativité des malades, ou pour soutenir les malades, qui est une source de vie et d’admiration. »

Comme je voulais rendre cet article spécial vraiment spécial, voici deux formats courts, un podcast et une vidéo, sur la créativité et la résilience.

Créativité d’un jeune médecin

L’élan de résilience peut nous venir lorsque nous nous rendons compte d’une chose qui change notre vision du monde, que ce soit que la vie est trop courte pour se disputer (ce sont les Beatles qui le disent), ou qu’en réalité, nous ne sommes pas le vilain petit canard au milieu de la multitude de majestueux cygnes au plumage immaculé, parce qu’ils le valent bien. Et là, Baptiste Baulieu, jeune médecin généraliste plein d’optimisme et de tolérance, parlera mieux que moi du sentiment d’être anormal lorsque l’on est malade, et son message pour éveiller notre élan de résilience. Je vous laisse avec sa courte mais très belle chronique sur France Inter :

« Il n’y a pas « moi, malade de ceci et cela » d’un côté, et « les autres, sains de corps et d’esprit ». Ça n’existe pas, ça. Jamais. Non. La normalité, c’est JUSTEMENT d’être emmerdé par des maladies, petites ou grosses, et par des troubles psychologiques qui nous font plus ou moins souffrir. »
— Baptiste Baulieu, « Alors Voilà» (9 septembre 2019), France Inter
https://www.franceinter.fr/emissions/alors-voila/alors-voila-09-septembre-2019

Des femmes créatives face à leur cancer

Voici aussi une vidéo de la très inspirante page Facebook de Simone Media. Ce court documentaire donne la parole à des femmes qui montrent différentes manières d’être créative et résiliente face à des cancers. Saluons l’à-propos de celle qui a pensé à parler d’acier pour aller avec cet article :

 « Aujourd’hui, je suis peut-être en béquilles, mais je fais du sport et j’ai un mental d’acier. »

Sources

Le Dictionnaire historique de la langue française, Alain Rey, Éditions Le Robert, 2002
https://www.etymonline.com/word/resilience?ref=etymonline_cros

4 réflexions sur “Origine du mot résilience (spécial Octobre rose)

  1. A reblogué ceci sur La plume d'Isandreet a ajouté:
    Le détective des mots a accepté de s’associer à mon projet de participer à Octobre rose, et a mené l’enquête sur ce très beau mot et concept « résilience ». Je vous rebloggue son article pour que vous puissiez le découvrir, le détective a mis un soin particulier à le réaliser, j’espère qu’il vous plaira autant qu’à moi. Je vous partage aussi cette réponse de Google à « comment devenir plus résilient, et qui vous fera déjà un peu comprendre pourquoi c’est ce mot qui a été mis en avant pour ce projet d’octobre rose: « En physique, la résilience traduit l’aptitude d’un corps à résister aux chocs et à reprendre sa structure initiale. Adaptée à la psychologie, elle désigne la capacité d’un individu à surmonter les moments douloureux de l’existence et à se développer, en dépit de l’adversité.

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